accueil > Extraits

Extraits

Teatro da mangiare ?
Avant-goût

TEATRO DA MANGIARE ?  SCENE 1L’Internationale

 

L’automne 89, lorsque le Mur tombait, Paola et moi nous avons quitté la coopérative Baule dei Suoni, la Camerateatro de la Morara, le théâtre.

Nous sommes partis vivre et travailler à la campagne dans une ferme abandonnée par mes parents dans la commune de Castello di Serravalle à trente kilomètres de Bologne et nous sommes devenus paysans.

Pourquoi avons-nous choisi ce chemin ?

Certainement par hasard, mais aussi à cause d’une précise volonté d’expiation.

Avec une conscience autopunitive, à travers un exil physique et spirituel, nous cherchions  une disparition sociale, un silence politique, une rupture sèche et douloureuse qui effaçait notre histoire, qui nous déracinait de notre passé, de notre culture et qui nous jetés nus, migrants dans le monde.

Le monde en dehors des foyers des théâtres, des centres sociaux alternatifs, des centres sociaux occupés, usines de nouvelles tendances, en dehors des bureaux et des conventions où on discutait de politique culturelle et de promotion théâtrale, en dehors des villes, des cinémas, des bus, des concerts. Dehors, dans le monde, au milieu d’une vallée humide et froide, belle uniquement d’une beauté sauvage.

Je n’avais jamais entendu tout ce silence, tout d’un coup et si longtemps à la suite. Un silence infini, mouillé dans une immobilité trempée, parfumée de champignons et de mousse : voilà la vallée du Marzatore.

Et cette vallée est devenue notre chambre des rêves.

Des nuits et des nuits, pendant des mois, chargées de rêves si clairs et si présents.

Des nuits de rêves que nous ne rêvions plus.